LOUIS MEUDEC
PERROSIEN, FTP,
RACONTE SA DEPORTATION



Louis MEUDEC

Louis MEUDEC
Né le 31 juillet 1924 à Perros-Guirec, manœuvre, demeurant rue du sergent L'Hévéder à Perros-Guirec, FTP.

Le 4 juin 1944, il est arrêté lors de la rafle de Perros-Guirec en même temps que son ami Jean PLUNET, déporté avec lui à Neuengamme, il reviendra de cet enfer son camarade Jean PLUNET aura moins de chance car il ne reviendra pas.
Interné à Compiègne dans l'Oise, déporté au camp de concentration de Neuengamme près de Hambourg en Allemagne à partir du 31 juillet 1944, kommando Brême Osterort, matricule 39509, libéré le 3 mai 1945, a vécu la tragédie à bord du paquebot "Cap Arcona" dans la mer Baltique. Il est le seul survivant de la rafle en 2002.
Louis MEUDEC raconte :
" Avant de quitter Compiègne, nous sommes obligés de nous déshabiller complètement, tous les objets personnels nous sont confisqués, puis sous la menace de kapos, aidés de chiens, nous sommes obligés de monter nus dans des wagons à bestiaux, à 100 dans chaque wagon, sans savoir quelle est notre destination.
Le convoi est composé de 1000 détenus, uniquement des hommes, les kapos nous menacent avec leurs chiens bergers allemands, le plus jeune du groupe a 16 ans, c'ést Rémi LE MERRER arrêté le même jour que moi à Perros-Guirec.
Le voyage dure quatre jours, sans manger, sans boire et sans se laver.
Arrivés à Neuengamme, nous sommes tondus, nous avons des parasites.
Par la suite, environ tous les quinze jours on nous fait " un autostrade " sur la tête, cela consiste à raser les cheveux, par un seul coup de tondeuse au milieu de la tête, de cette façon en cas d'évasion nous sommes tout de suite reconnus comme déporté.
On nous donne des vêtements : un pantalon et une chemise rayés le tout sans aucune poche, une paire de chaussettes " russes ", en toile et aussi un brassard, sur lequel figure notre numéro matricule, le mien est le 39509, celui de mon camarade Jean PLUNET est le 39553.
Pendant toute la durée de l'internement je n'ai eu que deux jeux de vêtements.
Puis sous la menace de revolvers nous sommes mis en rang cinq par cinq, les kapos sont agressifs, ils ont chacun un chien.
Le typhus règne sur le camp.
A Neuengamme , il y a différents camps de travail appelés kommandos, celui dans lequel je suis affecté est une carrière de plâtre, nous sommes astreints à travailler au minimum douze heures par jour, mais en fait on travaille tant qu'il fait jour.
Le matin, le repas consiste en un espèce de café, sans rien d'autre, à midi il n'y a rien manger, le soir nous avons une espèce de soupe, pendant six mois celle-ci est composée de choux et les six mois suivants cette soupe est à base de rutabagas.
La gamelle des repas sert aussi de pot de chambre, notre cuillère que nous accrochons sur notre chemise sert de couteau, car par usure nous arrivons à rendre tranchant le manche.
Lors de la libération du camp le 3 mai 1945, un bateau allemand l'Athen est accosté à un appontement, des Français nous annoncent que nous sommes libres, nous ne savons comment réagir, " est-ce possible ? " nous ne pouvons y croire.
Je rentre comme d'autres camarades dans une maison, au hasard, je me déshabille, quitte et me débarrasse de ces habits rayés pleins de poux, et je prends des vêtements qui me tombent sous la main.
Un char Anglais passe par là, leurs occupants nous donnent du chocolat, du tabac ...
La Croix Rouge vient avec des jeep et nous envoie à l'annexe de l'hôpital le plus proche, à mes côtés se trouve un instituteur de Rennes nommé JUHEL, que je n'ai jamais revu depuis et aussi un homme de couleur originaire de Bordeaux qui tellement heureux d'être libéré dit " Je suis né une deuxième fois le 3 mai 1945 ".
Nous sommes soignés et remis en forme pendant environ quinze jours.
Par avion, un Dacota, nous amène à Bruxelles, puis en train jusqu'à la gare du Nord en France.
Nous sommes dirigés vers l'hôtel Luthésia, boulevard Raspail à Paris qui est réquisitionné pour recevoir les gens de retour des camps de concentration, beaucoup de monde est présent en attente de reconnaître un des siens, beaucoup sont déçus, certains présentent des photos aux rescapés afin de savoir s'ils ont vu leur proche dans les camps, d'autres ne reconnaissent pas les leurs, tellement ils sont affaiblis par les mauvais traitements endurés.
Nous n'avons même pas put fumer une cigarette dans cet hôtel, car on ne trouve pas d'allumettes.
Après trois ou quatre jours passés dans ces lieux, je pars par le train de la gare Montparnasse, direction Plouaret, puis Plouaret à Lannion et enfin Lannion à Perros, je suis surpris de voir à la gare routière à côté du bassin de chasse autant de monde à m'attendre, il y a ma famille, le Maire de l'époque Monsieur Yves CONNAN et beaucoup d'amis, cela me touche beaucoup, c'est un moment inoubliable.
Un débitant en boissons de Perros m'offre une caisse de vin, et comme je reçois beaucoup de visites à la maison, je bois entre 12 heures et minuit, un verre sur chaque bouteille.
Après mon retour j'ai pris 38 kg en un mois. "
Louis MEUDEC est décédé en 2005 à Perros-Guirec.